Véhicule d’authenticité.
En d’autres temps, d’aucuns auraient pratiquement eu honte de se mouvoir publiquement sous des airs diffusés par des joueurs de balafons, surtout quand ceci se déroule sous le ciel urbain. C’était jugé un peu trop « traditionnel ». Pourtant, progressivement, la compréhension des enjeux de préservation de nos cultures a permis que la révolution prenne corps dans les mentalités des habitants de nos villes, dans toutes les couches de population.
Un bout de forêt sous les spots du monde
De plus en plus, il devient courant de découvrir à tous les coins des grandes villes africaines, adossé à un espace de convivialité ou faisant essentiellement la fierté de l’établissement, un orchestre de balafons. Et le relatif succès du phénomène vient d’ailleurs alourdir non-seulement les bourses des propriétaires de ces lieux de plaisance, mais surtout enrichir le lexique des citadins du Cameroun, du Mali ou du Sénégal. Dans le cadre du premier pays cité, l’expression « Mendzang » pour balafons en langue Béti de sa partie Sud, a trouvé une bonne place dans le quotidien des citoyens aussi bien de Yaoundé, de Douala, de Bafoussam, que de Garoua et de Limbé, comme c’est le cas pour Bala ou Balani à Dakar et Bamako. On se plait de plus en plus à se mouvoir autour de cette scène qui sait aujourd’hui se renouveler, tout en considérant les agrégats que draine l’effroyable vague « mondialisante », dans la perspective d’une démarche d’ouverture.
Il est donc loin le temps de la vulgaire exhibition d’un instrument et de quelques airs sortis tout droit des forêts du continent, juste pour épicer le récréatif chez des « bienséants » nostalgiques, avec quelques effluves « folklorescentes », folkloriques et bucoliques. Bien au contraire ! L’idiophone envoûtant s’est plutôt amplement émancipé de son champ expressif d’origine. Désormais, les bonnes vieilles berceuses de nos mamans et les refrains jadis entonnés exclusivement sur balafons et autres percussifs africains pour célébrer naissances, funérailles, mariages, intronisations et autres bonnes récoltes, sont relevés ou adoucis, par des apports plus occidentaux de guitare basse, de saxophone, de piano ou encore de batterie. On se permet même de belles excursions dans des domaines qui, hier encore, lui semblaient absolument tabous. Des groupes de Mendzang abordent dorénavant et de manière très agréable, en des enceintes de plus en plus raffinées, des standards de Jazz, de Blues, de Rumba, de Salsa, de Makossa, etc. Même les impétueux « prophètes » des courants urbains s’y posent avec une sacrée réussite. La culture Hip-hop, forte de ses rythmiques et ses rimes en pleine transe, est secouée par le vent ancestral et la magie de ces bouts de bois couplés aux calebasses.
Réalités et perspectives
Qu’il soit diatonique, pentatonique ou heptatonique, à six ou à vingt-cinq notes, d’Afrique de l’Ouest ou Centrale, le balafon a inspiré plus d’un succès et nourrit plus d’une discographie. Ceci de manière directe ou indirecte. Certains ont repris des airs populaires joués à l’ancienne dans l’arrière-pays tandis que d’autres, plus ingénieux, ont singé habilement le son des lames de bois en traficotant une guitare à l’aide d’une sourdine de circonstance, pour obtenir un son plus étouffé, et conquérir le monde. Les exemples sont fusion ; Les Têtes Brûlées du Cameroun avec leur incomparable guitariste dénommé Zanzibar (1962 – 22 octobre 1988), Mory Kanté, Gert Kilian « le balafoniste blanc » du Kâla Ethno Groove, en sont des illustrations criardes.
Aujourd’hui, nombre de musiciens, chercheurs et autres ethnomusicologues se replongent avec ferveur dans cette richesse patrimoniale africaine, augurant un avenir radieux pour les trésors d’un continent qui est loin d’avoir tout offert.
Le label Wood Time Records s’inscrit dans cette perspective, porter le Balafon dans les cimes de la culture musicale mondiale